Emploi des seniors : stop aux préjugés
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Sur le marché de l’emploi, les candidats de plus de 45 ans font face à des freins bien réels. Selon le baromètre Apec 2024, plus de 62 % des cadres de cette tranche d’âge estiment que leur âge constitue un obstacle à l’embauche. Derrière ce chiffre se cachent des préjugés persistants : manque d’adaptabilité, prétentions salariales trop élevées, problèmes de santé, faible maîtrise du numérique... Des idées reçues qui nuisent non seulement aux personnes concernées, mais aussi aux entreprises qui se privent de talents expérimentés. Décryptage.
Préjugé n°1 : « À partir de 45 ans, on devient trop cher »
C’est l’un des stéréotypes les plus tenaces : les seniors coûteraient plus cher aux employeurs. En cause, leur ancienneté et leur niveau d’expérience qui impliqueraient des rémunérations élevées.
→ La réalité : selon une étude de France Stratégie publiée en 2022, l’écart salarial entre les plus de 45 ans et les plus jeunes tend à se réduire. Les seniors sont souvent prêts à revoir leurs prétentions à la baisse pour rester actifs, notamment pour le plus âgés d’entre eux dans le cadre du cumul emploi-retraite. D’après l’Apec, 41 % des cadres de plus de 50 ans seraient prêts à accepter une baisse de salaire pour revenir retrouver du travail. D’après l’Etude « Les seniors et l’emploi en 2023 » de Seniors à votre Service, 8 candidats de + de 45 ans sur 10 seraient prêt à baisser leur rémunération.
→ Pourquoi c’est un faux problème : ce coût apparent doit être mis en regard des économies réalisées sur la formation initiale ou le temps d’adaptation. De plus, un salarié expérimenté est opérationnel plus vite, autonome, sait résoudre des situations complexes et peut faire bénéficier de son réseau son nouvel employeur. Par ailleurs, des aides à l’embauche existent pour les seniors, comme le contrat de professionnalisation sénior, le CDD senior le programme Atout Seniors et bientôt le CDI senior pour les + de 60 ans.
Préjugé n°2 : « Les seniors sont moins adaptables et moins flexibles »
Le mythe de la rigidité des seniors est profondément ancré dans les esprits. C’est un biais. Certains recruteurs pensent qu’ils sont moins enclins à changer de méthodes ou à s’adapter à un nouvel environnement.
→ Les chiffres à retenir : selon une étude Ifop pour Indeed (2023), 68 % des employeurs affirment que les salariés seniors font preuve d’un bon niveau d’adaptabilité. L’expérience permet aussi de mieux gérer les situations complexes et les changements organisationnels.
→ Une compétence clé : l’agilité professionnelle n’est pas l’apanage des jeunes générations. De nombreux seniors sont passés par plusieurs entreprises ou secteurs d’activités, ont exercé plusieurs métiers et possèdent justement une capacité d’adaptation acquise sur le terrain.
Préjugé n°3 : « Les plus de 45 ans maîtrisent mal les outils numériques »
À l’heure de la transformation digitale, certains recruteurs redoutent que les candidats de plus de 45 ans ne soient pas à l’aise avec les outils numériques, le télétravail ou les nouvelles technologies.
→ Des données rassurantes : d’après le Baromètre du Numérique (ARCEP, 2023), 92 % des 45-59 ans utilisent Internet quotidiennement et 79 % utilisent régulièrement des outils bureautiques et collaboratifs. La fracture numérique concerne principalement les plus de 70 ans, pas les actifs proches de la cinquantaine ou de la soixantaine. Ce sont des classes d’âge qui ont connu l’arrivé d’internet, des téléphones portables, des réseaux sociaux, et maintenant de l’IA qui s’y sont adaptées.
→ Une montée en compétences continue : de nombreux dispositifs existent pour accompagner les seniors souvent les moins qualifiés dans la maîtrise du digital, à commencer par les plans de développement des compétences en entreprise. Le Compte personnel de formation (CPF) est aussi mobilisé par les seniors comme pour tout autre collaborateur, notamment pour des formations bureautiques ou digitales.
Préjugé n°4 : « Les seniors sont moins productifs »
Un autre cliché tenace : passé un certain âge, les performances professionnelles diminueraient, notamment du fait d’une baisse d’énergie ou de problèmes de santé.
→ Ce que disent les études : une enquête de l’OCDE de 2021 souligne que la productivité des salariés ne dépend pas de leur âge, mais de leur poste, de leur environnement de travail et de leur niveau de motivation. Par ailleurs, les seniors compensent par leur expérience, leur autonomie et leur capacité de concentration. Une étude publiée le 5 mars 2025 dans Science Advances explique qu’à 65 ans les scores de compétences cognitives sont encore meilleurs qu'à 20 ans !
→ Un engagement fort : selon l’étude Malakoff Humanis 2023, les salariés de plus de 50 ans présentent un taux d’absentéisme inférieur à celui des plus jeunes (3,6 % contre 5,1 % en moyenne).
Préjugé n°5 : « Il est trop tard pour former les seniors »
Certains employeurs hésitent à investir dans la formation des salariés de plus de 45 ans, estimant qu’ils approchent de la fin de leur carrière.
→ Une vision dépassée : dans un contexte de pénurie de talents, il devient essentiel de miser sur le développement des compétences à tout âge. France Compétences indique que les plus de 45 ans représentent près de 25 % des bénéficiaires du CPF en 2024, ce qui est encore trop peu.
→ Un investissement rentable : l’INSEE souligne qu’un salarié formé après 45 ans reste en poste en moyenne encore 10 à 15 ans, surtout avec le recul de l’âge légal de départ à la retraite (64 ans en France depuis la réforme de 2023). La formation est nécessaire à tout âge afin de gagner en compétences et de conserver son employabilité.
Préjugé n°6 : « Les seniors sont difficiles à manager »
L’idée selon laquelle les plus de 45 ans accepteraient mal l’autorité ou seraient moins enclins à suivre des consignes persiste dans certains milieux professionnels.
→ Des données qui contredisent : selon une étude Cegos 2024, 74 % des managers interrogés estiment qu’il est aussi facile de manager un senior qu’un junior. La clé réside dans une communication claire, quel que soit l’âge. On ne manage pas un junior comme un senior. Le rôle d’un bon manager est de s’appuyer sur les compétences des membres de son équipe, quelque soit leur âge et de les aider à progresser.
→ Un savoir-être précieux : avec l’expérience viennent aussi des qualités relationnelles, une meilleure gestion du stress et des conflits, autant d’atouts pour favoriser le travail d’équipe.
Vers une prise de conscience progressive
Même si ces préjugés demeurent, certains signes montrent une évolution des mentalités. Le rapport du Conseil d’orientation pour l’emploi (COE, 2023) note que l’emploi des seniors est devenu un enjeu national. La France reste en retard : seuls 58.4 % des 55-64 ans sont en emploi, contre 74 % en Allemagne.
Pour y remédier, le gouvernement français a multiplié les dispositifs incitatifs via une campagne de communication sur la valorisation des 50+ au printemps 2025.
Dépasser les idées reçues pour valoriser l’expérience
Les préjugés sur les plus de 45 ans en recherche d’emploi sont non seulement injustes, infondés mais aussi contre-productifs. Dans un contexte de tensions sur le marché du travail, miser sur les compétences des seniors apparaît comme une évidence. Déconstruire ces clichés passe par une meilleure information, mais aussi par des actions concrètes au sein des entreprises : recrutement inclusif, formation continue, adaptation des conditions de travail, formation des managers à la non-discrimination.
En 2030, 1 français sur 3 aura plus de 60 ans, l’inclusion des + de 50 ans en entreprise doit s’opérer maintenant.